Les pentes de ski de Prévost

Vue du Big Hill depuis le Maple Leap Inn près du tennis, vers 1935 - Collection de Guy Thibault
Vue du Big Hill depuis le Maple Leap Inn près du tennis, vers 1935 - Collection de Guy Thibault

Bien avant que le ski alpin structuré tel que nous le connaissons aujourd’hui existe, le ski se pratique déjà sur le territoire de Prévost. Au début des années 1920, à l’ouest de la rivière du Nord, près du village du Vieux-Prévost, chaque hiver voit apparaître de curieuses traces dans la neige sur les pâturages à flanc de collines des terres ondulées appartenant à Gordon Shaw et à Ménasippe Richer. On y pratique un type de ski qui ressemble davantage à du ski cross country, mélangeant allègrement les marches-glissade et les descentes de collines. Il n’y a pas encore de structure d’accueil particulière ni de remonte-pente dans ces champs privés où sont tolérés les skieurs. Alex Foster, un résident du secteur, constate que certains touristes prennent plaisir à descendre et remonter inlassablement en pas de canard la même pente. Une idée farfelue germe alors dans son esprit. Pourquoi ne pas y installer un remonte-pente mécanique! À l’hiver 1933, son invention, surnommée le Foster’s Folly, change à jamais la façon de faire du ski. Finies les randonnées au hasard, car on s’attache désormais à un lieu précis, près d’un remonte-pente. L’idée fait littéralement boule de neige et d’autres l’imitent par la suite.

Entre 1930 et 1960, le territoire du Prévost actuel a connu cinq sites de ski : trois sur la rive ouest de la rivière du Nord et deux sur la rive est.

Site A

Autour des rues du Mont, des Pignons et Bellevue se trouvait auparavant la terre de Ménasippe Richer où Alex Foster installe son remonte-pente. Cette installation est de courte durée, car Camille Richer prend la relève de la pente et y installe deux remonte-pente permanents (un câble et un poma lift), à peine à 100 mètres plus au sud. Connue comme la côte à Richer, elle prend le nom de Côte 50 et disparaît vers 1962 à cause des travaux pour le prolongement de l’autoroute des Laurentides.

Cette pente de ski est d’abord connue sous le nom de Big Hill, mais même à l’époque de la Côte 50, le surnom demeure.

Site B

Le Saut de la mort pour les sauts et son voisin Le Viking pour le downhill étaient localisés un peu plus au nord de la rue du Versant-du-Ruisseau. Le nom du saut viendrait du fait qu’un skieur y a déjà perdu la vie.

Site C

En suivant la montée Sainte-Thérèse vers le sud, non loin de la ferme Pagé, se trouvait le Sommet Parent. Faisant face au village de Lesage, le bas de ses quatre pentes se trouvait vis-à-vis des rues Boisé, de la Rivière et Chatelet. À cause du prolongement de l’autoroute, cette pente connaît le même sort que la Côte 50 en 1962.

Site D

Du côté est de la rivière du Nord cette fois, derrière l’hôtel Mont-Cassin (l’actuel Faubourg), la Côte à Beaulieu s’étendait sur les actuelles rues Beaulieu, des Verseaux et du Cap. La base de la pente était à deux pas de la voie ferrée du Canadien Pacifique, mais son faible dénivelé la rendait moins attirante pour les skieurs.

Site E

La côte Rendez-vous ou Côte à Rainville était elle aussi située du côté est de la rivière du Nord, non loin de la plage du lac Écho, où se situe la rue du Monte-Pente en mémoire de cette pente. Celle-ci était la propriété de Raymond Rainville, qui tenait l’hôtel Rendez-vous souvent appelé l’hôtel Rainville. Cette pente cesse ses opérations en 1959.

Les trois premiers sites étaient situés sur la rive est de la rivière, donc localisés sur le territoire du Vieux-Prévost, sans que cela ait toujours été reconnu. En effet, pour plusieurs personnes, les noms de Big Hill, de Côte 50 ou du Saut de la mort sont attribués à Shawbridge, alors que le Sommet Parent est identifié comme la Côte Lesage. Sur les innombrables cartes postales du célèbre photographe Charpentier qui inondent encore le marché des photos d’époque, c’est le nom de « Shawbridge » qui figure au bas des documents. Comment expliquer une telle méprise?

Il faut d’abord se rappeler qu’avant la fusion de 1973, le territoire de Prévost est composé de trois entités bien distinctes. Il y a d’abord Shawbridge, le plus ancien des trois villages fondateurs, qui est alors majoritairement anglophone et de confession protestante. Au sud, un village du nom de Lesage est plutôt de souche francophone et catholique. Dans les deux cas, leur territoire respectif est strictement du côté est de la rivière. Quant à lui, le village du Vieux-Prévost est entièrement localisé sur le côté ouest de la rivière et est composé d’une population mixte, de souches francophone et juive. Fait important, cette petite municipalité autrefois rattachée à Saint-Sauveur n’a pas de gare, même si la voie du Canadien National passe sur son territoire. Lorsque le remonte-pente à Foster attire les premières vagues de skieurs sur le territoire du Vieux-Prévost, c’est à l’une des deux gares du C.N. et du C.P. de Shawbridge que ceux-ci descendent, créant ainsi une fausse impression compréhensible d’aller skier à Shawbridge. Même le célèbre photographe Charpentier s’y est laissé prendre. Il a systématiquement identifié ses innombrables photographies de skieurs par «Shawbridge» durant les années 1930 et 1940 et a par conséquent fortement contribué à ancrer cette impression dans la mémoire collective.

À peu de choses près, c’est la même méprise pour le Sommet Parent souvent appelé Côte Lesage. Descendues à la gare de Lesage, les villégiateurs chaussent leurs skis et suivent les flèches de couleur orange menant au village sis à près de 600 mètres de la gare. En marche-glissade, ils atteignent l’église catholique afin d’assister à la messe du dimanche pour la bénédiction des skis. Pour atteindre le Sommet Parent situé de l’autre côté de la rivière dans le vieux Prévost, les plus intrépides traversent la rivière sur la glace par ce qui est aujourd’hui la rue Brunette. Les moins pressés choisissent plutôt de longer la rue Principale sur leurs skis jusqu’à son actuelle intersection avec la route 117, traversent la rivière sur le pont du C.N. et atteignent le bas des pentes. La proximité de la gare de Lesage ainsi que l’importante implication du curé Léo Baron et du maire Henri Renaud qui encouragent leurs paroissiens francophones à pratiquer ce sport vivifiant et sain sur «leur pente», il n’est pas surprenant que le Sommet Parent soit baptisé la Côte Lesage par les villégiateurs et même les journaux de l’époque.

Comme le Vieux-Prévost n’a jamais eu de gare sur son territoire, les trois pentes de ski établies sur son territoire ont longtemps dépendu des gares des deux autres villages voisins, surtout avant que la route 11 ne soit déneigée l’hiver à partir de 1937. Par la suite, l’autobus et l’automobile deviennent une alternative au train. Le Sommet Parent en profite davantage, car il est en opération de 1948 à 1959, au moment où les trains de neige ont cédé le pas devant la poussée irréversible de l’automobile. En conclusion, c’est autour des gares de Shawbridge que se forge un mythe dans l’imaginaire collectif et qu’est écrite une partie de l’histoire du ski des Laurentides.

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