Annoncé dès 1961, l’arrivée de l’autoroute à Prévost a transformé radicalement le village en 1964. Déjà affaiblie par l’exode des nombreux vacanciers insatisfaits de l’insalubrité des eaux de la rivière du Nord, la situation sera aggravée par la perte des trois pentes de ski devenues inaccessibles.
On notera d’ailleurs que l’installation du premier remonte-pente d’Amérique du Nord, jusqu’ici affirmée comme ayant eu lieu à Shawbridge, a en fait été réalisée dans la côte 50, dite de la Big Hill, au village de Prévost, par Ira Strong, qui avait son garage à Shawbridge. L’encadraient alors la pente du saut de la Mort, plus au nord, et celle du Sommet Parent, plus au sud, elle aussi généralement identifiée à tort comme située à Lesage, parce que c’est des environs de son église que pouvaient partir les skieurs avant de traverser la rivière vers Prévost.
Or, le tracé de l’autoroute a coupé la base de ces aménagements et empêché tout développement subséquent de leurs équipements. Et c’est sans compter la soixantaine de terrains (sur plus de 200) qui ont été expropriés pour permettre le passage des voies actuelles. On notera, parmi leurs propriétaires, la mention de nombreux noms d’origine juive, qui témoignent de l’impressionnant passé de villégiature de l’ancien Prévost : Bercovitch, Charatsky, Guralnik, Hacomsky, Karasky, Shabinsky, Sivrinovitch, Wolansky, Zaccharine... On y trouvera évidemment aussi les noms de Louis Brunelle, Alexis Chapleau, Clarinda Francœur, épouse d’Hormisdas Morin, Jean-Marie Morin, Antoine Therrien et Yvon Trudel, ancien maire.
On démolira d’ailleurs plusieurs bâtiments à la hâte, tandis que d’autres seront la proie d’une vague d’incendies, dont on peut douter de la nature accidentelle, qui emporteront une dizaine de maisons à partir de 1961, pour un total de 38 demeures disparues, si on tient compte d’une période allant de 1950 à 1965.
L’autoroute, qui atteindra ensuite Sainte-Adèle en 1965 et Sainte-Agathe en 1974, obligera à de nombreux travaux d’aqueduc dans le village de Prévost et au démantèlement définitif des rails du Canadien National (en 1962), un tracé dont les seuls vestiges demeurent les piliers qui servaient à franchir la rivière du Nord et les contreforts de béton encore visibles le long de l’actuelle route 117, près de Sainte-Anne des Lacs.
Marc Gagnon, dernier maire du village démantelé, a travaillé comme péager de l’autoute, tandis qu’un de ses ingénieurs, Claude Hotte, deviendra maire du Prévost fusionné en 1982.
SOURCES : Procès-verbaux du conseil municipal de Prévost, notes de Marc Gagnon et résultats de témoignages croisés de divers anciens citoyens du village.
Au plus fort de la popularité du Foster's Folly, le nombre d'automobiles est d'à peine 6 voitures par cent habitants, ce qui explique l'importance du train pour accéder aux pistes. De 1949 à 1959, cette proportion passe à 13 % et ce n'est qu'un début. C'est cette formidable poussée de l'automobile partout en Amérique qui force l'État à garnir le paysage québécois d'axes routiers couvrant de plus en plus les régions éloignées des grands centres. Le nombre d'automobiles est d'ailleurs déjà passé à 24 % lorsque l'autoroute des Laurentides est mise en service à la hauteur des pentes du Vieux-Prévost.
Un poste de péage est installé à la hauteur du Vieux-Prévost (1964), presque au bas des pistes du Sommet Parent, un peu au nord de la Porte du Nord actuelle. Le tracé de l'autoroute traverse les anciennes pentes de ski qui avaient fait le bonheur des premiers skieurs alpins des années 30 et 40. Évidemment, une telle route allait modifier la place qu'occupaient jadis le Vieux-Prévost et Shawbridge sur l'échiquier touristique, puisque l'accès aux autres centres de villégiature plus au nord s'en trouvait facilité, surtout après 1964.