À la demande d’Augustin-Norbert Morin, un pont privé est construit pour relier les deux rives de la rivière du Nord dans la paroisse de Saint-Jérôme à un emplacement généralement appelé « la grande pointe ». Le seul autre pont existant dans l’augmentation à cette époque est dans le village de Dumontville (Saint-Jérôme). Celui-ci est situé à plusieurs kilomètres plus au sud et le réseau routier vers le nord sur la rive ouest de la rivière du Nord est déficient. Il est impératif pour Morin d’améliorer la situation afin de faciliter les déplacements et favoriser le développement de ce qui deviendra Morin-Heights, Saint-Sauveur et Sainte-Adèle.
Augustin-Norbert Morin confie la construction du pont, le 1er mai 1848, à André Lesage, un cultivateur et un menuisier-charpentier bien établi dans le secteur. La nouvelle structure doit être construite avec du bois de qualité qui peut être récupéré à même les terres de Morin; mesurer 21 pieds de large ; être muni de barrières, peintes en blanc et être garantie 10 ans. Une maison de péage de 12 pieds sur 18 pieds en pièce sur pièce est érigée près d’une des entrées. Jusqu’en 1864, il faut payer pour traverser le pont. On raconte qu’en hiver, de nombreux citoyens passaient par la rivière gelée pour éviter des frais. Morin est propriétaire du pont jusqu’en 1863 alors qu’il le vend à William Shaw qui possède le lot qui borde le pont du côté du village de Shawbridge.
Au moment de l’achat, le pont est en très mauvais état. Shaw décide de le revendre au Conseil de la municipalité du comté de Terrebonne dès l’année suivante. Il est statué par le Conseil qu’un nouveau pont sera érigé au même emplacement, au coût de 1 275 $. Il sera maintenant possible de l’emprunter gratuitement puisqu’il devient public et est financé par le gouvernement et les municipalités de Saint-Sauveur, Sainte-Adèle et Sainte-Agathe. Il semble que c’est à partir de cette époque que le pont prend le nom de Shaw.
Moins de dix ans plus tard, en 1872, il doit être de nouveau reconstruit. Puis, en 1885 une crue importante l’emporte obligeant le Conseil de comté à ériger une nouvelle structure. Certaines municipalités du comté se demandent alors s’il est pertinent de le reconstruire puisque d’autres ponts enjambent la rivière à différents endroits au nord de Shawbridge. Il y a finalement entente et un pont solide est bâti, rapporte-t-on dans le journal local Le Nord. En 1922, alors que le pont est vieillissant, le gouvernement lance un appel d’offres pour la construction d’un ouvrage en fer et en béton armé. Au printemps 1923, les travaux sont en cours pour une ouverture à la fin de l’été. Malheureusement, un homme y a accidentellement trouvé la mort durant la construction alors qu’il tombe, en avril, dans l’eau froide et tumultueuse de la rivière du Nord.
Dès sa construction, le pont Shaw permet les déplacements entre Saint-Jérôme et le Nord par une route principale, appelée chemin du Roy à ses débuts. Elle prend le nom de rue Principale et on lui donne éventuellement un numéro, la route 11, ou route nationale. Les trois villages profiteront du passage de cette voie de circulation en leur centre et des commerces s’y installeront pour répondre aux besoins de la population. Ce sont d’abord des charretiers et des forgerons qui ouvriront des magasins puis des garages à l’époque où l’automobile remplace progressivement les charrettes.
Le pont Shaw demeure encore aujourd’hui l’élément architectural le plus caractéristique de Prévost. Au cours des années, il a connu souvent des réparations et des fermetures temporaires. En 2011, son tablier est remis à neuf et sa structure métallique repeinte. Force est d’admettre que même datant du début du 20e siècle, il est d’allure résolument moderne.
